Qu’est-ce que la philosophie ?
1. La philosophie comme esprit critique
La philosophie commence par un éveil. C’est l’homme qui se rend compte qu’il est enchaîné au fond de la caverne et qui tente de se défaire de ses liens, comme le dit Platon dans son allégorie de la caverne (Platon) Il émet un doute sur les choses établies, il s’étonne de son état, il ouvre les yeux.
La philosophie n’est donc pas une matière à enseigner mais plutôt un éveil aux mystères de notre existence. Socrate par exemple, s’est appliqué toute sa vie de philosophe à interroger ses concitoyens pour leur faire prendre conscience de leur ignorance. Il poussait ceux qui se pensaient savants à douter de leur prétendu savoir : c’est ce que l’on appelle la maïeutique, l’art de faire accoucher les esprits.
Ainsi, comme l’enfant qui sort de l’obscurité et de la protection du ventre de sa mère pour voir la lumière du jour, philosopher c’est en quelque sorte devenir pleinement humain.
Une fois, que l’homme a osé se défaire du confort de ses « vérités », il peut commencer à se diriger vers la lumière, vers LA vérité. Alors, commence un long combat de la raison contre l’opinion, les vérités toutes faites, les arguments d’autorité… Toutes ces réponses trop simples qui nous font retomber, enchaînés, au fond de la caverne. Le philosophe doit à tout prix préférer la vérité à la facilité car il n’est pas facile de se remettre en question et de prendre conscience de son ignorance. Mais pour être philosophe il faut tout critiquer, tout creuser et ne rien laisser au hasard de l’opinion et cela tout au long de sa vie.
2. La philosophie comme tentative de comprendre le monde
Mais la philosophie ne vise pas seulement à critiquer le monde. Elle tente de faire les liens entre les connaissances, entre tous les aspects de l’homme sans les compartimenter comme le font les spécialistes (étudier le corps humain, étudier la psychologie,…). En effet, les scientifiques s’intéressent à un seul objet d’étude : ils sont des spécialistes. Au contraire, le philosophe est multidisciplinaire : il étudie l’homme, la nature, l’âme, les concepts, la biologie, Dieu,…
De plus, « avoir l'esprit philosophique, c'est être capable de s'étonner des événements habituels et des choses de tous les jours, de poser comme sujet d'étude ce qu'il y a de plus général et de plus ordinaire, tandis que l'étonnement du savant ne se produit qu'à propos de phénomènes rares et choisis » (Schopenhauer)
C’est par la philosophie que l’on peut comprendre le rapport que l’homme entretient avec la nature, la politique, la littérature…Le philosophe tente de rendre compte de l’homme dans sa globalité et dans sa complexité. Le philosophe cherche à donner sens au monde qui l’entoure, un monde en perpétuel mouvement, un monde visible et invisible, sensible et spirituel. Il fait des liens pour tenter d’expliquer l’univers, pour donner sens à la vie, pour faire « accoucher les esprits » et donner à l’homme sa place dans le monde. La philosophie cherche à comprendre, c'est-à-dire « prendre ensemble ». Elle fait le lien entre la théorie et la pratique.
3. La philosophie comme art de vivre
La philosophie a aussi pour but le mieux-vivre. Elle permet à l’homme d’avoir des repères en dehors du religieux, du mythe, du divin. Elle ne doit cependant pas être confondue avec les tendances « new-age » car la philosophie se veut rationnelle. Par la philosophie, les hommes peuvent développer leur force d’âme, c’est une forme d’éthique qui permet au philosophe de se transformer pour mieux vivre en utilisant sa raison.
Etre philosophe, c’est mener une vie philosophique et appeler les autres hommes à se convertir, à changer leur mode de vie pour devenir des philosophes.
Le philosophe enseigne, il est le guide de l’âme des autres hommes (allégorie de la caverne, Platon) vers une vie intellectuelle et spirituelle détournée de l’inessentiel afin de devenir enfin maître de soi-même et atteindre l’ataraxie (absence de trouble). C’est l’homme qui, une fois qu’il a admiré les beautés de la philosophie, ne peut s’empêcher de les partager avec les autres hommes.
Parlons maintenant de la philosophie en tant que matière à enseigner. Ici encore le terme peut comporter plusieurs sens. En effet, on trouve de nombreux cours dont l’intitulé ne comporte pas le mot philosophie mais qui peuvent être philosophiques lorsqu’ils ne sont pas enseignés de manière dogmatique : le cours de morale, de religion ou d’éthique et les cours d’éducation à la citoyenneté par exemple. Au contraire, les cours de « philosophie » proposés dans certains systèmes éducatifs sont souvent des cours magistraux sur l’histoire de la philosophie ou encore enseignés avec une idéologie très prononcée. Ces cours sont, dans ce cas, tout sauf philosophiques car ils ne permettent aucune réflexion ou réflexivité de la part des élèves et de l’enseignant.
Afin de savoir ce qu’est la philosophie comme activité pédagogique, il faut se demander si le cours vise au questionnement, à l’étonnement, au doute, à un «discours que l’âme se tient à elle-même» (Platon, Le Thééthète) vise-t-il l’acquisition d’un art de vivre ?
Mais surtout, l’activité met-elle en avant l’apprentissage d’une pensée réflexive et rationnelle?
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