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Les questions que vous vous posez et leurs réponses.

 

 

 

  1. Le temps des pourquoi : Faut-il vraiment répondre à toutes leurs questions ?

 

 

Comme le dit François Galichet (praticien et théoricien de la philosophie avec les enfants), dès que les enfants savent parler, ils se posent des questions. Ce qu'il appelle « l'âge des pourquoi », vers 4 ou 5 ans, est l'âge bien connu où l'enfant ne cesse de demander aux autres et de se demander pourquoi les choses qui l'entourent sont telles qu'elles sont, pourquoi les gens sont tels qu'ils sont et agissent comme ils le font. Ce phénomène est révélateur d'un besoin de réponses qui les amène toujours plus loin que les explications qui leurs sont données. C'est pourquoi, il semble vain de vouloir répondre aux questions incessantes.

Pourtant, c’est par de telles réflexions que l’on détruit les chercheurs, philosophes naturels qui existent chez les enfants. C’est ainsi que les enfants se désintéressent de l’école car l’école ne répond pas à leurs questions, elle se désintéresse d’eux.

 

C'est pour cela que François Galichet, insiste sur le fait qu'il est bien plus cohérent et nécessaire pour le bien-être de l’enfant de l’accompagner dans sa confrontation à l'ignorance, humaine par essence. L’adulte doit ouvrir un dialogue avec l’enfant. En effet, ce dernier cherche un guide, un tuteur dans sa découverte du monde. En exposant à l’adulte ce qu’il sait et ce qu’il ignore, en cherchant avec lui les réponses à ses questions, l’enfant se sent rassuré dans ses doutes et dans sa démarche.

 

 

 

  2. Avant de philosopher ne faudrait-il pas d’abord qu’ils maîtrisent la langue ?

 

 

Une des premières exigences du philosopher est de faire attention aux termes que l’on emploie, il faut peser les mots que l'on utilise pour exprimer ses idées et penser à leur définition même. L'argument qui dit que l'on ne peut pas philosopher avec des enfants parce qu'ils ne maîtrisent pas assez leur langue est peu fondé. Le travail de la langue et de la pensée sont indissociables, donc un progrès en langue implique un progrès de la pensée et réciproquement.

Mais est-il pertinent d'attendre que les élèves atteignent un certain niveau de langue pour pouvoir faire de la philosophie ou peut-on utiliser la philosophie comme outil pour développer le langage ?

On reproche souvent aux enfants de manquer de vocabulaire lorsqu'ils abordent la philosophie dans le secondaire ou dans le supérieur. Il serait donc illusoire de tout attendre de l'instrument langagier. Rappelons que le mot n'est pas qu'un simple habit de la pensée, les mots donnent forme à la pensée, ils la font exister.

Par ailleurs, la partie du cerveau qui permet la maîtrise du langage se développe entre 2 et 6 ans, les enfants de primaire sont donc tout à fait capables de développer leurs capacités langagières et de participer à un débat philosophique.

 

 

 

  3. Débattre et conceptualiser : Nos élèves en sont-ils réellement capables?

 

Une autre exigence est que les élèves doivent être des sujets rationnels puisque philosopher c'est faire usage de sa raison. « Faire de la philosophie avec des enfants c'est éveiller la raison en eux. » (Lalanne, 2004). Il ne s'agit pas simplement de leur faire exprimer des sujets affectifs ou psychologiques mais bien de les tourner vers des jugements rationnels. Une des grandes difficultés est d'amener les élèves à exprimer autre chose que leurs propres opinions, et à questionner et examiner leurs opinions.

Les élèves doivent apprendre à élever leur réflexion au-delà de l'opinion pour tendre vers l'universalité c'est-à-dire passer de l’expérience à l’abstraction. Ce passage ne peut s'effectuer sans faire preuve d'une certaine rigueur propre à la philosophie. Pour cela, l'élève doit apprendre à problématiser, argumenter et conceptualiser. La conceptualisation reste malgré tout l'étape la plus difficile pour les enfants car ils tendront dans un premier temps à la généralisation (logique inductive).

 

Cependant, dans le film de Jean-Pierre Pozzi et Pierre Barougier : Ce n'est qu'un début (2010), on découvre à quel point, en une année scolaire, des élèves de maternelle progressent dans leur capacité à débattre. Les enfants sont capables de rebondir sur les réponses de leurs camarades et ne sont plus simplement centrés sur leurs expériences personnelles car le langage est un des éléments essentiels qui permet le développement de l’esprit. Par ailleurs, les enfants partagent aisément leur histoire, expriment leurs idées et leurs désaccords et construisent ensemble une généralisation, guidés par leur professeur.

Certains parents témoignent même leur reconnaissance à cette dernière pour avoir abordé avec les enfants des sujets délicats comme celui de la mort ou de l'amour.

 

 

  4. Le passage à l’abstraction : une déstabilisation psychologique ?

 

 

On peut se poser la question suivante : est-il possible que les enfants ne soient pas prêts à accueillir un enseignement aussi abstrait ? En effet, une inquiétude demeure quant à la déstabilisation et la démoralisation que pourraient subir les enfants face à un apprentissage qui dépasse leurs capacités d'assimilation.

A cela, on peut répondre que le philosopher dont il est ici question est un dispositif qui repose essentiellement sur la parole des enfants, guidée par celle de l'adulte sans qu'aucun apprentissage ne soit transmis directement mais au contraire construit par les enfants eux-mêmes.

 

Alors à quel âge peut-on commencer à philosopher ?

 

Il semble que le développement physiologique soit très fluctuant d’un enfant à l’autre. Ainsi, déterminer l'âge exact auquel il est possible de faire de la philosophie s'avère en fin de compte être une tâche peu productive. Tout dépend de l’enfant.

Pourtant, pour toutes les raisons citées plus haut, on ne peut abandonner la discussion philosophique en primaire. Ce serait aussi absurde que d’abandonner l’apprentissage des multiplications sous prétexte que les enfants ne les connaissent pas encore.

Pour que la capacité philosophique évolue dans le temps (et apparaisse chez certains), elle doit être étayée par un tuteur. C'est dans cette mesure que l’introduction des questionnements philosophiques en primaire est un dispositif tout à fait positif.

 

Cependant, il paraît évident que pour développer les compétences du philosopher : problématiser, argumenter et conceptualiser, il faut non seulement qu’elles soient travaillées au cours des séances de discussions philosophiques mais aussi lors de séances complémentaires et tout au long de l’année.

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